Muhammad-Mansour ibn Said Abdourakib ibn Said Ahmad ibn Saidali (Marahani) ibn sultan Salim II ibn Sultan Allaoui I er AL MADOUWA

  • Monjol, un gentleman……

    On le surnommait Monjol puis Mwila, je ne sais pas trop pourquoi. Mais Monjol peut être pour signifier « Mon joli » car il était probablement beau gosse dans son enfance pour être resté assez bel homme dans sa vie d’adulte.

    Son vrai nom était Mohamed Ben Said Mansour neveu du cadi Said Rakib et frère de Kassim Dema pour ceux qui se rappellent encore ce jeune footballeur de notre équipe de jeunes »Monaco », et malheureusement parti trop tôt.

    De stature élancée , il portait l’habit traditionnel, kandzu ou djuba avec bonheur sinon élégance et fréquentait assidûment la mosquée du vendredi et son beteleaju.

    Monjol était de cette génération entravée par l’extrême sévérité du système éducatif colonial alignant les concours à tous les passages de classe. Seuls les meilleurs perçaient ce système étanche tandis que les autres doublaient, redoublaient, triplaient les classes à tire larigot.

    Monjol avait dû quitter l’école en classe de CE2 comme tant d’autres ou en CM2, repoussés par l’infranchissable barrage du concours d’entrée en 6e.

    Mais il avait gardé de son passage à l’école une vraie passion pour la langue du « Bourgeois Gentilhomme », une émouvante délectation de beaux mots dont il agrémentait sa conversation.

    Il avait une grande connaissance de proverbes qu’il ne manquait pas de vous asséner pour marquer sa supériorité francophile.

    « Mais ma parole, vous n’apprenez rien à l’école. Disait il de sa grande voix assurée et quelque peu goguenarde :  » Qui veut aller loin ménage sa monture »  » Celui qui n’a pas franchi l’autre rive, ne doit pas se moquer de celui qui se noie » « Rien ne sert de courir, il faut partir à point »…..

    Et à chaque réplique que vous pouviez lui rétorquer ou si vous aviez le malheur de répondre par des proverbes, alors la « battle » pouvait continuer et durer jusqu’à ce que vous acceptiez votre défaite et la vacuité de votre répertoire.

    Ou une autre fois c’était un mot tiré des oubliettes du dictionnaire qui venait narguer ses interlocuteurs: alors que veut dire « apoplexie », »jaspiner » ? Vous ne savez pas ? Et dire que vous avez tel ou tel diplôme, et cela pouvait continuer longtemps dans l’hilarité générale.

    On se souviendra également des moments où il était intervenu dans des discours de mariage dans un français au style ampoulé et parfois grandiloquent dont il en avait le secret.

    « Une joie immense me pousse en dépit de la timidité extrême à accepter la faveur inespérée que m’offrent les parents des époux de vous tenir ce petit discours. « 

    Le français c’était son jouet, sa fierté et en réanimant la mémoire de cet enfant de Mutsamudu, je me prends à me demander quel parcours littéraire eût été le sien, si la vie lui avait été plus prodigue.

    Mansur, Monjol, Mwila réveillera probablement en vous des anecdotes plus ou moins truculentes car il fait partie de ces figures pittoresques parfois insolites comme les Bweni Rahamatu qui font la mémoire culturelle et « civilisationnelle » de notre cité.

    Monjol était certainement un gentilhomme, l’ami de tous les jeunes avec qui il aimait engager ses joutes spirituelles et son esprit doit encore hanter la vaste salle de la grande mosquée ou la proximité cherchant vainement à interpeller les fidèles de son bagout irremplaçable.

    Pour ceux qui ne l’ont pas connu, tel est le portrait de l’ami Monjol.

    Que le paradis soit sa demeure éternelle !

    Kamaroudine

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